Des racines profondes
La période coloniale
L’arrivée des Français en 1830 et l’instauration du régime colonial amène en Algérie bon nombre de civils à des titres divers; la colonisation armée fait place à la colonisation de peuplement. Les aumôniers militaires ne suffisent plus. En 1838 un évêché est installé à Alger, dont le premier titulaire est Mgr Dupuch. La conquête militaire n’est pas encore terminée. Des relations s’établissent entre l’Emir Abdelkader et un représentant de l’évêque pour négocier des échanges de prisonniers. En 1846, un nouvel évêque est nommé, Mgr Pavy. Il amorce l’édification de la basilique de Notre Dame d’Afrique. De nouvelles paroisses sont créées, ainsi qu’un petit et un grand séminaire. Une correspondance entre l’Evêque et l’Emir Abdelkader en exil est l’occasion pour ce dernier d’exprimer sa déférence et l’humanisme qui l’a inspiré dans la protection qu’il a assurée aux Chrétiens de Syrie persécutés par les Druzes.
Le cardinal Lavigerie
En 1867 Monseigneur Lavigerie est nommé au siège d’Alger. Il y vient avec l’ambition d’être l’évêque de tous. Dès son arrivée, l’occasion lui en est offerte par la famine qui s’est abattue sur la population où sévit aussi le typhus. Il recueille un bon nombre d’orphelins ou d’enfants abandonnés. Peu après il perçoit la nécessité de créer un institut d’hommes, puis de femmes: celui des Missionnaires d’Afrique (Pères Blancs) et celui des Sœurs Missionnaires de N-D d’Afrique (Sœurs Blanches). Son intention est d’étendre l’action caritative de l’Eglise au delà des paroisses et même des limites de son diocèse, notamment en Afrique noire à partir de 1875. Il a achevé et consacré la basilique de N-D d’Afrique en 1872. Il est nommé cardinal en 1882. Il a joué un rôle de premier plan dans l’Eglise par ses relations avec le Vatican, par son action au Proche-Orient pour la formation du clergé grec-melkite, par son rôle dans l’Eglise de France en prônant le ralliement des catholiques à la République et par sa campagne anti-esclavagiste en Europe.
Déjà en 1866 avaient été érigés le diocèse d’Oran et celui de Constantine et d’Hippone. Après l’épreuve des mesures anticléricales de 1901-1905, ces diocèses sont surtout préoccupés de leur survie. Le souci principal est d’organiser et d’animer la vie des paroisses et des œuvres chrétiennes. L’ouverture de l’Eglise au delà des communautés chrétiennes est assurée, pense-t-on communément, par les activités éducatives et sociales des Pères Blancs et des Sœurs Blanches. C’est durant cette période pourtant que se situe l’aventure spirituelle du Père Charles de Foucauld qui l’amène à vivre en ermite à Beni-Abbes et à Tamanrasset, au Hoggar, où il sera tué en 1916. Son idéal de « Frère universel » a marqué la spiritualité de l’Eglise, il a suscité la fondation d’instituts des « Petits Frères » et « Petites Sœurs », voués au partage de vie avec les plus pauvres à travers le monde. Mais ils restent fidèles à leur terre natale, l’Algérie.
L’Eglise vit comme le pays sous le régime colonial. L’Algérie est considérée comme département français et de ce fait, les diocèses d’Algérie sont rattachés à l’Eglise de France.
Il faudra attendre 1945 avec la révolte dite « de Sétif » pour jeter le doute sur la légitimité de cet état de fait. L’idée et les mouvements nationalistes prennent corps et réclament progressivement l’indépendance. En novembre 1954 ils s’organisent en maquis et déclenchent la guerre de libération. Entre temps, en 1947, est nommé à Constantine un nouvel évêque, Mgr Léon-Etienne Duval. Découvrant la situation des populations locales en même temps que la revendication nationaliste, il plaide pour le respect du droit et de la justice sociale, à commencer par les plus démunis. Il établit aussi des liens d’amitié avec les personnalités autochtones représentatives de l’Est algérien.