Nous vous voyons très régulièrement à la messe de la paroisse Catholique d’Alger. En quelques mots quel est votre parcours de Foi?
Dans mon pays, l’appartenance traditionnelle à l’Église catholique était associée aux aspirations nationales des Polonais. C’est le cas depuis les partitions de notre Royaume par nos voisins, lorsqu’en 1795 la Pologne a disparu de la carte de l’Europe pendant 123 ans. Ce fut aussi le cas en 1939-1945, lorsque la Pologne perdit à nouveau son indépendance, pendant l’occupation allemande et soviétique, et plus tard, lorsqu’un million de Polonais, dont ma génération, durent vivre sous le régime communiste imposé par la force, après la trahison des alliés occidentaux de Yalta en 1945.
N’oublions pas qu’en 1980 les ouvriers du chantier naval de Gdańsk et leur chef emblématique Lech Wałęsa avaient commencé leur grève par une messe et que sur la porte du chantier naval (alors nommé d’après Lénine !) ils avaient affiché un portrait du pape Jean-Paul II et de la « Vierge noire » de Częstochowa.
Selon moi et des millions de Polonais, nous avons retrouvé notre liberté grâce à la Providence divine, grâce aux prières du Pape polonais et des martyrs de l’Église, dont le symbole était le Père Jerzy Popiełuszko, assassiné par le Service de sécurité communiste en 1984.
Quant à ma formation générale, philosophique, elle a été, dès mes années lycéennes, sous le signe de cette pensée exprimée par Dostoïevski : « Si Dieu n’existe pas, tout est permis ». Rappelons-nous dans ce contexte la terreur de la Révolution française de 1789 ou de la Révolution bolchevique.
Et depuis quelques mois ici à Alger, je lis le célèbre roman philosophique de l’auteur autrichien Robert Musil, « L’Homme sans qualités ». C’est près de 2 000 pages consacrées à la lutte interne des personnages de ce roman perdus dans un monde marqué par le traumatisme de la Grande Guerre qui s’approche et à l’effondrement de l’ordre traditionnel. En grande partie, c’était probablement le résultat des pensées et expériences propres à l’auteur, qui était terrifié par le vide de l’existence humaine. Et quelle était la source de ce vide éprouvé par l’écrivain Robert Musil et ses héros, qui menaient une vie apparemment confortable et qui avaient accès aux biens et aux plaisirs qu’offrait il y a cent ans Vienne, la capitale autrichienne? Eh bien, la raison de ce vide, des états dépressifs menant directement aux tendances suicidaires, était le manque de sens de l’existence résultant directement du rejet de la foi. Je recommande cette lecture à tout le monde. Certes, même si ce n’était pas l’intention de l’écrivain lui-même, son œuvre constitue un grand argument pour la foi, pour le Christ, et pour l’affirmation de la nécessité de Dieu.
2. Vous êtes en poste à Alger depuis 6 années. l’Église catholique est en plein synode sur le thème : « Communion, Participation, Mission ». Qu’est-ce que ces trois mots évoquent pour vous et tout particulièrement dans notre Église locale ici à Alger ?
Je crois que ma modeste présence parmi les autres croyants aux messes dominicales dans les églises d’Alger exprime l’idée communautaire contenue dans le mot communion et c’est une manifestation visible d’une volonté de participation. Quant à l’esprit de la mission il est porté par les prêtres, les religieux et les religieuses, ainsi que par la communauté « Salam » du Brésil (un prêtre et des laïcs), qui témoignent par leur service spirituel ici en Algérie. Il s’inscrit dans la continuité des travaux entamés par les Pères Blancs, Charles de Foucauld ou les martyrs du monastère de Tibhirine.
3. Comment votre Foi vous aide-t-elle dans votre travail de diplomate ?
La foi m’aide à accomplir toutes les tâches, pas seulement mon travail diplomatique. La prière, le signe de la croix, signifient qu’on veut confier notre travail à Dieu. Par conséquent, il devrait être accompli avec engagement, avec diligence, par respect pour Lui.
Propos recueillis par Didier Lucas