Sur la liberté religieuse

En ouverture à une rencontre sur le thème « Liberté religieuse, protection et garanties » monsieur le Ministre algérien des Affaires religieuses Youcef Belmehdia prononcé un discours dont voici de larges extraits

Après avoir très aimablement salué les personnalités invitées et ses collaborateurs, monsieur le Ministre des Affaires religieuses a poursuivi :

« Au début, permettez-moi de prier avec vous et de demander à Dieu, le Tout-Puissant, de le louer et de le remercier pour ses bénédictions innombrables. C’est Lui qui a créé l’homme, lui a enseigné le langage et a établi des lois pour préserver sa dignité et garantir sa liberté, en préservant et protégeant son essence humaine. Que la prière et la paix soient sur notre maître Mohammed et ses frères prophètes, et paix sur ses serviteurs qu’Il a choisis, et dont il a fait des phares de guidance, et à qui Il a montré le chemin.

Il ne fait aucun doute que celui qui a un esprit rationnel, lorsqu’il parle de liberté religieuse à tout moment ou en tout lieu, parle nécessairement de l’homme lui-même. On ne peut pas séparer l’homme de la religion. En effet, il existe des villes sur terre sans installations militaires, sans universités, et peut-être sans agglomérations industrielles, mais comme l’ont dit des historiens tels que Will Durant, il n’existe aucune ville sur terre sans temples et lieux de culte. C’est la première nature de l’homme et son droit fondamental que Dieu a ancré en lui avant même la création des États, car c’est une relation entre chaque individu et son Créateur.

Avant que les lois apparaissent sur le papier, depuis Hammurabi et d’autres, jusqu’à ce que nous atteignions le système des droits de l’homme au milieu du siècle dernier, la liberté religieuse est une des racines de l’existence humaine, mentionnée dans notre révélation et consacrée par la raison par tous.

Toutes les lois viennent la protéger et la revendiquer. Dans le Livre de Dieu, il est dit : “Pas de contrainte en religion” et “À vous votre religion, et à moi ma religion”. De ce texte, nous déduisons qu’il n’est permis à personne d’agresser une âme, tout comme il n’est pas permis d’agresser une croyance ou une pratique religieuse. C’est un principe établi par notre sainte religion et reconnu par toutes les religions, qui ont fait de la dignité humaine une règle générale indivisible. Notre sainte loi a ordonné la préservation de la religion, de la vie, des biens, de la raison et de la descendance, ce que l’on appelle dans certains évangiles les dix commandements. Nous en convenons tous, car la religion est auprès de Dieu et est sacrée.

Notre Prophète Mohammed, paix soit sur lui, l’a confirmé dans la pratique lorsqu’il a établi la Constitution de Médine, en accordant aux gens du Livre, résidents de Médine, le statut de citoyens, respectant ainsi leurs droits en matière de vie, de biens et de croyances. L’Algérie n’a pas dévié de ce principe fondamental.

Vous avez vu dans ce clip certains exemples qui m’ont rappelé l’un des chefs de l’Église catholique en Algérie, Henri Teissier, lorsqu’il a pris sa retraite. Nous étions en réunion, et en présence de ministres des affaires religieuses précédents, il a déclaré que dans notre pays, l’Algérie, la religion n’a jamais été confrontée à des difficultés, ni de la part des citoyens ni des autorités de ce pays. C’est un témoignage enregistré qui montre que l’Algérie n’a pas dévié de ce principe fondamental.

À travers son histoire longue, l’Algérie a été un pays de libertés et de diversité culturelle et religieuse, un carrefour de races, de cultures et de croyances, avec des positions immortelles enregistrées par l’histoire, montrant au monde son visage accueillant et son rôle dans la protection des opprimés. L’Emir Abdelkader, qu’Allah lui accorde miséricorde, est un symbole et un exemple dans ce domaine. À partir de sa vision des droits, nous avons pu déduire ce que l’on appelle le droit international humanitaire et les droits de l’homme, lorsqu’il a défendu ses frères chrétiens en terre de Damas, la plus ancienne ville du monde. C’est la même chose qui a été prise en compte lors de la Révolution de libération. Je l’ai mentionné plusieurs fois, quand nous avons combattu l’agresseur, nous avons protégé ceux qui étaient des hommes de foi pratiquant leur culte sans oppression.

La situation devient, je ne dirai pas étonnante ni créative, mais elle s’enracine davantage lorsque nous constatons que ces concepts sont concrétisés et inscrits dans son système politique, même dans sa constitution depuis les premières constitutions. Mais cela a été réaffirmé, protégé et préservé pour protéger tous les lieux de culte et maintenir les droits de pratique religieuse sans distinction ni discrimination. Ce qui a été contenu dans la Constitution de 2020 en matière de garanties découle de cet héritage spirituel qui a imprégné ce pays. Notre pays ne s’est pas contenté de stipuler des lois garantissant et protégeant la pratique des rites religieux, mais il a également agi pour affirmer cet engagement. Il a protégé les lieux de culte et a contribué à leur restauration. Je cite par exemple l’église Saint-Augustin à Annaba, qui est encore aujourd’hui entourée d’une certaine attention de la part de chaque wali qui a traversé cette wilaya. J’accompagne mes frères dans cette affaire depuis environ six mois ou quatre mois. Je peux mentionner Santa Cruze à Oran et aussi à Alger, où nous avons lancé, avec l’éminent Ministre Wali de la Wilaya d’Alger, en présence de Son Éminence le Cardinal Jean-Paul Vesco, un projet de restauration et de réparation de la Cathédrale du Sacré-Cœur à Alger, hier, sous le patronage de l’État. …

Cet intérêt se manifeste également à travers la visite de Son Excellence le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, à l’État du Vatican et la rencontre qu’il a eue avec Sa Sainteté le Pape, récemment, le 14 du mois. Cela a placé le principe de la liberté religieuse dans un contexte supérieur, celui du dialogue entre les civilisations, entre les religions, et le contact avec les dirigeants des pays. Ce n’est pas juste une première, mais un autre saut qualitatif qui confirme ce que nous mentionnons, et il n’est pas étrange de souligner que l’Algérie n’est pas un pays qui brandit ces valeurs comme un slogan à utiliser dans les espaces médiatiques, mais c’est une réalité concrète dans sa relation diplomatique et la vision de l’État algérien à travers notre diplomatie, représentée par des cadres de notre ministère des Affaires étrangères.

Le ministère des Affaires étrangères a envoyé ce message à travers cette rencontre, un message clair à l’ensemble du monde que l’Algérie croit que la paix mondiale commence par le respect des croyances religieuses, et que la connaissance humaine est l’horizon de la stabilité mondiale, et que le dialogue entre les religions est le moyen de construire un avenir plus juste et plus miséricordieux…

Tout ce cadre indique clairement, mes frères, que nous avançons, grâce à Dieu, dans la concrétisation de ce slogan que nous brandissons maintenant : la liberté religieuse, protection et garanties. Mais comment concrétiser cela en se basant sur la constitution à travers des mécanismes pratiques ? Au ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, nous travaillons sous les directives de Son Excellence le Président de la République, Monsieur Abdelmadjid Tebboune, pour ancrer cette approche humaine élevée et diffuser les valeurs de paix, de tolérance et d’harmonie entre tous les citoyens, et renforcer le principe du respect mutuel qui renforce la conscience religieuse modérée, qui rejette l’extrémisme, la violence et la criminalité…

Nous croyons que dans notre pays, grâce à Dieu, et de par notre place dans le monde islamique, et à travers notre profonde expérience historique de coexistence entre les religions et les cultures, que le dialogue est le seul moyen de construire un monde régi par la sécurité et la stabilité, et que les valeurs humaines communes peuvent briser les murs de la haine et construire des ponts d’affection entre les gens…

Nos savants, ou les juristes et les historiens, même dans l’anthropologie ancienne, ont dit qu’on ne peut fonder un État que sur trois bases : la religion, l’éthique et le droit. Nous voulons avancer selon cette trilogie pour vivre en sécurité. 

Gloire et immortalité à nos martyrs. Vive l’Algérie et bienvenue. »

 

Marie France Grangaud

Église Catholique d'Algérie