Nombre de prières des premiers chrétiens, généralement anonymes, nous sont parvenues sur des papyrus ou de tessons de poterie. Aux IIIe et IVe siècles, époque à laquelle remontent la plupart de ces écrits, le papyrus coûtait cher. Pour des textes courts, on écrivait souvent sur des « ostraka », des éclats de terre cuite peu onéreux, qui se prêtaient à la gravure, à l’incision et à l’écriture à l’encre avec un roseau taillé appelé « calame ». Le papyrus convenait mieux pour des textes plus longs. En ce mois de Noël, voici un extrait d’une ample prière d’origine inconnue, écrite en grec, transmise par un papyrus appartenant à la collection de l’archiduc Rainier (1827-1913), conservée à la bibliothèque nationale de Vienne, en Autriche, et classée patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2001.
Prière au Christ, premier-né
Les étoiles qui brillent
et les forces en mouvement :
tout disparaît et perd son éclat
devant la splendeur de ta lumière
et la puissance de ta grandeur.
Seul tu es visible, tu manifestes
l’image du Père tout-puissant
et tu nous fais ainsi connaître
la grandeur du Père et du Fils.
Comme le Père puissant, dans les sphères célestes,
ainsi toi, son Enfant,
tu es en notre univers
le Premier, le Coryphée (*)
et le Seigneur de toute puissance,
tu es la seconde grandeur
qui provient de celle du Père,
dès les origines, tu portes
les fondements de la terre entière.
Tu es notre modèle
notre ordonnateur et notre passeur ;
tu es notre chemin et la porte qui mène à la lumière.
Tu es l’image de la justice.
Tu es sans cesse notre étoile et notre lumière.
[…] Je te loue, Seigneur, pour ta puissance,
pour ta splendeur et ta quiétude,
pour ta lumière et tes anges,
pour tes envoyés qui gouvernent
et fortifient tout ce qui vit ;
pour tous ceux qui naissent de toi,
qui te demeurent unis et accomplissent ta volonté.
[…] Tu es le Premier
et l’ouvrier de toutes les œuvres de prix,
quand les rayons de ta lumière
descendent des hauteurs
et rencontrent le monde de nos ténèbres,
toutes les puissances, les anges,
les maîtres de la vie,
les images du ciel et de la terre…
les étoiles qui brillent et les forces en mouvement :
tout disparaît et perd son éclat,
devant la splendeur de ta lumière.
et la puissance de ta grandeur.
(*) Celui qui tient le premier rang, notamment dans un chœur.
Bibliothèque Nationale de Vienne, Collection Rainier, papyrus nn. 19896 et 19898. Texte intégral in J.-P. Migne, Patrologia Orientalis 18, pp. 445-448, traduit par A. Hamman, Prière des premiers chrétiens, Paris 1952, 19622, pp. 130-133.
+ Nicolas Lhernould