« Christianisme et Islam: au service de la fraternité dans un monde divisé », tel est l’intitulé de la troisième édition de ces rencontres organisées par l’archevêché situé dans le nord de la Croatie et auxquelles ont participés pour la première fois cette année de jeunes théologiens et enseignants musulmans.
Le dialogue avec l’Islam pour construire un monde fraternel a été au cœur des discussions lors de ces Rencontres théologiques méditerranéennes de Rijeka, qui se sont ouvertes dimanche 15 juillet, dans la maison pastorale Domus Laurana, à Lovran, sur la côte adriatique croate. Parmi les 38 étudiants et doctorants en théologie, se sont retrouvés pour la première fois neuf musulmans, dont un des cinq conférenciers, le théologien islamique Benjamin Idriz, imam de Penzberg en Allemagne. Quinze étudiants seront orthodoxes, huit catholiques et six protestants, principalement originaires de Croatie, de Serbie, de Bosnie-Herzégovine, mais aussi de Grèce, de France, d’Autriche et d’Allemagne.
La salutation d’Uzinić et le message d’Abdelsalam
Les travaux ont débuté avec le discours introductif de l’archevêque de Rijeka-Fiume Mate Uzinić, promoteur des Rencontres avec un groupe organisateur de théologiens et de biblistes, sur le thème « Christianisme et Islam: au service de la fraternité dans un monde divisé« . Un message du juge Mohamed Abdelsalam, secrétaire général du Prix Zayed pour la fraternité humaine et témoin du dialogue qui a conduit à la signature historique, le 4 février 2019 à Abu Dhabi, du Document sur la Fraternité humaine, fut également lu.
Conférences et travaux de groupe
Chaque matin, du mardi au vendredi, une présentation a été proposée par les cinq conférenciers qui, l’après-midi, ont approfondit les différents aspects du sujet avec les étudiants, en coordonnant autant de groupes de travail. Le premier intervenant a été le théologien croate Tomislav Kovač, directeur du département de théologie fondamentale à la faculté catholique de théologie de Zagreb. Après lui, il a parlé Benjamin Idriz, imam et théologien de la communauté islamique de Penzberg en Allemagne, et la théologienne grecque-orthodoxe Angeliki Ziaka, professeur d’études religieuses et responsable de la commission des études islamiques à la faculté de théologie de l’université Aristote de Thessalonique. Les Rencontres se sont achevés par des conférences du théologien protestant Ulrich Schmiedel, professeur de christianisme mondial à l’université de Lund en Suède, et de Zilka Spahić-Šiljak, professeur d’études sur le genre et directrice académique du Centre universitaire de ressources sur le genre (UNIGeRC) à l’université de Sarajevo.
À la tribune, sœur Becquart du Synode des évêques
Deux interventions publiques ont eu lieu le mardi 16 juillet au soir, avec sœur Nathalie Becquart, sous-secrétaire du Synode des évêques, sur le thème « Synodalité, œcuménisme et dialogue interreligieux« . La religieuse a fait bénéficié l’auditoire de sa longue expérience du dialogue islamo-chrétien en France, notamment impliquant les jeunes. La seconde, mercredi 17 juillet au soir, les cinq conférenciers ont débattue du thème des rencontres théologiques, lors d’une table ronde dans la salle de conférence de l’archevêché de Rijeka.
Mgr Uzinić: deux religions pour œuvrer pour la fraternité
Dans une interview accordée au site bosniaque Polis.ba, l’archevêque Mate Uzinić a souligné que le dialogue entre chrétiens et musulmans, notamment au niveau théologique, peut aider les deux communautés de croyants «à ne plus être une cause de division, afin d’être au service de la fraternité». Mais pour dialoguer, «il faut trouver des interlocuteurs», comme y est parvenu François lorsqu’il signait le document d’Abu Dhabi avec le cheick Al-Tayyeb. En choisissant le thème des Rencontres de cette année, explique Mgr Uzinić, «nous voulons encourager les étudiants en théologie de notre région, accablés par les divisions et la haine, à trouver des interlocuteurs les uns dans les autres. Et à commencer à construire un monde meilleur, sans divisions, également dans les Balkans».
Pas de frontières mais des ponts, le dialogue n’est jamais un danger
Pour l’archevêque de Rijeka, des rencontres comme celles qui se sont déroulées à Lovran peuvent transmettre un message porteur aux chrétiens et aux musulmans, «que le dialogue avec les membres d’autres communautés religieuses ne nous met pas en danger, qu’en parlant avec les autres nous ne renonçons pas à nous-mêmes, et que cela ne signifie pas un syncrétisme religieux. Ce dialogue nous aide à connaître les autres, nous encourage en fait à être encore meilleurs, plus authentiques nous-mêmes». Sans cette ouverture et ce dialogue, explique Mgr Uzinić, «les autres sont une menace pour nous, ils nous font peur, ils sont nos ennemis. Il en résulte une fermeture, et très souvent un fondamentalisme religieux, qui nous conduit à devenir les ennemis des autres. Et en effet, nous sommes alors ennemis de nous-mêmes et de notre religion que nous pensons défendre». Or, conclut-il, les frontières et les obstacles plaçés entre nous, «ne nous sauveront pas et ne peuvent pas nous sauver, tandis que les ponts que nous voulons construire entre nous peuvent le faire et le feront. Le dialogue est l’un de ces ponts».
Alessandro Di Bussolo – Cité du Vatican