« Poursuis la paix, recherche-la » (Psaume 33,15)
Depuis un an et demi la pandémie de coronavirus fait violence à notre monde, et focalise de manière compréhensible une grande part de toutes les attentions ; au risque de parfois reléguer au deuxième plan certaines situations de tensions et de conflits génératrices de violences, qui ont été plus nombreuses encore en 2020 qu’en 2019. Les experts du « groupe de recherche sur les causes de la guerre », de l’université de Hambourg, qui analysent depuis plus de trente ans l’évolution des conflits armés à travers le monde, recensaient, dans leur rapport de mi-décembre, 29 situations de guerres pour la seule année 2020, soit une de plus que l’année précédente, dont la majorité sur le continent africain. S’y sont ajoutées depuis les situations en Birmanie, au Mozambique, en Terre Sainte…
Le dimanche 16 mai était célébrée la « journée internationale du vivre ensemble en paix », dont le principe a été adopté en 2017 par les Nations Unies à partir d’une proposition de l’Association Internationale Soufie Alawiyya et de son président d’honneur, le Cheikh Khaled Bentounes, de Mostaganem. Le 16 mai, le pape François présidait aussi une messe en la basilique Saint Pierre avec les fidèles de Birmanie résidant à Rome. A l’heure où la paix est fragilisée en bien des parties du monde, les paroles de son homélie sont une invitation renouvelée à « poursuivre » et « rechercher » la paix, en repartant autant de fois que nécessaire de ce qui est à la portée de chacun. « La paix est artisanale », aime répéter le pape. Elle se bâtit et se consolide en commençant « d’en bas », à partir des processus de fraternisation qui s’enracinent dans le concret de la vie et des relations quotidiennes.
« Nous sommes appelés à garder l’unité, à prendre au sérieux cette importante supplication de Jésus au Père : être un, former une famille, avoir le courage de vivre des liens d’amitié, d’amour, de fraternité. Combien il y a besoin, surtout aujourd’hui, de fraternité ! Je sais que certaine situations politiques et sociales vous dépassent, mais l’engagement pour la paix et la fraternité naît toujours d’en bas : chacun, à son niveau, peut faire sa part. Chacun peut s’engager à être, à son niveau, un constructeur de fraternité, à être semeur de fraternité, à travailler à reconstruire ce qui est brisé au lieu d’alimenter la violence. Nous sommes appelés également à le faire en tant qu’Eglise : promouvons le dialogue, le respect de l’autre, la protection du frère, la communion ! Et ne laissons pas entrer dans l’Eglise la logique des partis, la logique qui divise, la logique qui met chacun de nous au centre, en écartant les autres. Cela détruit : détruit la famille, détruit l’Eglise, détruit la société, détruit nous-mêmes » (Pape François, Homélie du 16 mai 2021).
Les fractures du monde sont d’abord celles des cœurs. Elles se nourrissent de ce qui fait obstacle à la fraternité, parfois seulement de la négligence à en faire un véritable impératif, une priorité de vie partagée. La fraternité est le terreau de la paix : accueillons l’appel à en être « semeurs » ensemble comme une urgence et une mission.
+ Nicolas LHERNOULD
Evêque de Constantine et Hippone