C’est l’histoire d’un enfant, Aldino Piccinin ou Aldo, d’origine italienne, né à Massa Carrara, en Toscane, (supposé vers 1570). Il fut capturé en 1578 par les « Barbaresques » (*) sur le château Malaspina et emmené à Alger.
Il s’écrit qu’il fut acheté par Fatah-Allah Ben Khodja pour 60 pièces d’or. Sous sa coupe, l’enfant grimpera très vite dans la hiérarchie des Janissaires, et deviendra le « Lion des mers » qui écumera la Méditerranée. Lalla Nfissa, mère adoptive, lui donnera amour et sérénité aux Palais des Raïs, actuel Bastion 23.
Sous le nom désormais d’Ali Bitchin, il deviendra chef de la taïfa des raïs, grande corporation des corsaires de Méditerranée vec des équipages rompus aux combats. Alger sera une place forte maritime de piraterie. Devenu amiral de la flotte de la régence d’Alger, il s’enrichira en pratiquant « le corso » violente piraterie maritime et l’un des systèmes des revenus de l’état.
La princesse Lallahoum, la fille du roi de Koukou
Le royaume Amazigh de Koukou fondé vers 1515, régna sur une grande partie de la Grande Kabylie. À son apogée de 1520 à 1527, son autorité s’étend des montagnes de l’Atlas à Alger.
Vers 1622, Ali Bitchin pour épouser Lallahoum, la fille du roi de Koukou au caractère bien trempé, qui dédaigne ses cadeaux somptuaires, il lui fit construire une mosquée avec du marbre de Massa.
Cette mosquée de style ottoman a été l’église Notre-Dame-des-Victoires, puis est redevenue une mosquée située à la basse casbah, classée au patrimoine mondial de l’Unesco : (Djemaâ Ali-Betchin).
La vie d’Ali Betchin revisitée : un livre de l’italien Riccardo Nicolaï (*) édité en Algérie
«…Je suis originaire du même village qu’Ali Piccinin, Mirteto, dans la ville de Massa en Toscane. Un jour, j’ai trouvé une lettre que le prince de Massa, Alberico Malaspina avait écrite à Ali Piccinin quand il avait été ravi par les corsaires barbaresques d’Alger. Cette lettre a suscité mon intérêt et ma curiosité… ».
L’ouvrage de Riccardo Nicolaï est consacré à Ali Bitchin. C’est aussi l’histoire de la régence d’Alger, de l’épopée des Raïs, celle du royaume de Koukou d’Ahmed Oul Kadhi en Kabylie. La littérature autorise la fiction mêlée de faits historiques doublés d’un conte d’amour.
Riccardo Nicolaï l’a initialement publié dans son pays en 2016 : « Ali Piccinin, un mortegiano pascia di algeri ». Puis, en 2017, une traduction en langue française a été déjà réalisée par Karim Metref, établi à Turin pour les lecteurs algériens, parue aux éditions Koukou (épuisée).
400 ans et une statue
Si vous allez flâner au jardin du Hamma, tout près du bassin de « La baigneuse » ,vous pourrez voir une statue des époux, Ali Bitchin et Lallahom Belkadi, offerte par la ville de Massa, sa ville natale et réalisée par des étudiants des beaux-arts.
A l’occasion des 400 ans de la construction de la mosquée Ali Bitchin, une statue vient d’être inaugurée en leur hommage. Elle a été réalisée en Italie en marbre de Massa.
Une initiative lancée en 2018 par l’écrivain italien et réalisée par les élèves du lycée artistique Felice Palma sous la conduite de l’artiste Alessandro Mosti sur la base d’une conception de l’élève, Giulia Vatteroni.
Un nouveau roman entre Algérie et Italie
« Entre l’Algérie et l’Italie, il y a une histoire passionnante à partager ». Dans un entretien avec Farouk Baba-Hadji dans El Watan (07/02/2024), l’écrivain dévoile la trame de son prochain roman « Jugurtha, la dernière nuit à Mamertino », celle du roi numide qui s’est rebellé contre Rome. Le livre a été traduit en français et vient d’être publié aux éditions Dar el Kateb et présenté au dernier Salon du livre d’Alger.
Monique Perret