A L’ÉCOUTE DE NOS PÈRES …3

Aux origines du christianisme en Afrique du Nord – Les premiers martyrs

Au mois de juillet, nous faisons mémoire de plusieurs grandes figures qui ont marqué l’histoire du christianisme en Afrique du Nord. Tout d’abord, leur témoignage étant ordinairement considéré comme le plus ancien connu à ce jour, saint Spérat et ses compagnons, les martyrs scillitains, fêtés le 17 juillet. Victor Saxer écrit à leur sujet : « Toute biographie est impossible pour ces martyrs dont nous ne connaissons que les Actes de leur condamnation à mort. Ils s’appelaient Speratus, Nartzalus, Cittinus, Donata, Secunda, Vestia, Veturius, Felix, Aquilinus, Laetantius, Ianuaria et Generosa, et furent martyrisés le 17 juillet 180. Leur patrie n’est indiquée que dans le titre des Actes et dans les martyrologes : XVI. Kal Aug. SS. Scillitanorum. Ce nom désigne un lieu non identifié de la province Proconsulaire d’Afrique. Il ne s’agit pas de Cillium [l’orthographe est différente] dont les ruines subsistent près de Kasserine » (V. Saxer, Saints anciens d’Afrique du Nord, Vatican 1979, p. 31).

Contemporains des Scillitains, nous commémorons localement le 4 juillet les martyrs de Madaure (M’daourouch aujourd’hui, à une cinquantaine de kilomètres de Souk Ahras). Ils s’appelaient Miggin, Sanaem, Namphamo et Lucitas. Là encore, nous ne savons presque rien d’eux, si ce n’est qu’il moururent au IIe siècle sous les coups de la persécution impériale dans la ville de Madaure, où Augustin, beaucoup plus tard, ferait ses premières études. Une lettre d’Augustin en fait d’ailleurs mention, qualifiant Namphamo d’archimartyr (cf. Augustin, Lettre XVI à Maxime de Madaure, n. 2, datée de l’an 390). Certains auteurs ont considéré ce qualificatif comme synonyme de protomartyr, ce qui signifierait que Namphamo et ses compagnons seraient les premiers chrétiens connus à avoir été tués pour leur foi, et que leur mort serait antérieure à celle des Scillitains. D’autres ont compris le mot plutôt comme une marque de haute vénération, sans doute « la première en popularité auprès des fidèles du temps » (cf. Saxer, Id., 12), avec pour conséquence qu’on ne pourrait rien affirmer de sûr quant à la date de leur mort. Fut-ce, comme pour les Scillitains, sous l’empereur Commode, qui régna de 176 à 192 ? A l’époque de Septime Sévère, son successeur, entre 193 et 211 ? Nous n’en savons rien de définitif, si ce n’est que leur témoignage a profondément marqué les chrétiens de leur temps.

Le 10 juillet, enfin, nous rappelons sainte Marcienne de Cherchell, originaire de Rusuccuru (aujourd’hui Taksebt, à proximité de Tigzirt et de Tizi Ouzou), qui s’était retirée à Césarée (le nom antique de Cherchell) pour s’y consacrer à Dieu dans la virginité. Nous la connaissons essentiellement par le texte sa Passion, qui mêle sans doute une part de légende à l’histoire véridique, racontant les circonstances ayant entraîné son martyre. La date de sa mort reste incertaine, à la charnière entre le IIIe et le IVe siècles, lors de la persécution de Dioclétien. « La sainte martyre Marcienne était citoyenne du municipe de Rusuccuru. Cette belle jeune fille, de naissance noble, s’était consacrée à Dieu. Par mépris des richesses, elle vint à Césarée, où elle habitait une cellule, gardait la chasteté et fuyait les plaisirs et les ambitions de la vie mondaine. Un jour, elle sortit pour visiter la ville et se mêla à la foule sans se faire connaître. Près de la porte de Tipasa, sur une place, se dressait une statue de Diane [déesse de la chasse] ; à ses pieds, une source coulait dans une vasque de marbre. A la vue de l’idole, la bienheureuse Marcienne ne put rester immobile et brisa la statue. Ce spectacle remplit les gens de fureur. Ils se mirent à frapper la faible jeune fille et à la rouer de coups » […] (Passion de Marcienne, in V. Saxer, Id., 139-140). Marcienne fut exposée aux bêtes et mourut suite à la morsure d’un léopard.

+ Nicolas Lhernould

Église Catholique d'Algérie